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Biogaz et biométhane : de quoi parle-t-on ?
Les déchets organiques, issus de l’agriculture, des eaux usées ou encore du tri sélectif, sont valorisés dans des usines de méthanisation, où suite à un processus biologique, du biogaz est produit. Ce dernier est ensuite utilisé comme source d'énergie renouvelable pour générer de l'électricité ou de la chaleur, ou encore être valorisé en biométhane.
Le biométhane est un sous-produit du biogaz qui est purifié et concentré en méthane. Le biogaz épuré a les mêmes propriétés que le gaz naturel. Il peut donc être utilisé comme carburant pour les véhicules à gaz naturel, servir à la production d’électricité ou être injecté dans le réseau de gaz naturel. La production et l’utilisation de biométhane émettent en moyenne 10 fois moins d’émissions de gaz à effet de serre que le gaz naturel et 14 fois moins que le fioul.
Biométhane et objectifs de décarbonisation
En 2011, la France a inauguré la mise en service d’un premier site d’injection de biométhane dans les réseaux de gaz. Au 31 décembre 2022, la France comptait 1705 unités de production de biogaz. Parmi elles, 514 unités le valorisaient sous forme de biométhane injecté dans les réseaux, contre seulement 214 fin 2020.
Cette accélération de la filière du biométhane en France répond aux objectifs fixés aux niveaux national et européen. Cela se traduit par la réduction des gaz à effet de serre, une meilleure efficacité énergétique et la diversification du mix énergétique, appelé à reposer plus fortement sur les énergies renouvelables.
La Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE), qui détermine les modalités d’action des pouvoirs publics pour la gestion de l’ensemble des formes d’énergie sur le territoire métropolitain, prévoit un objectif de biométhane injecté entre 14 et 22 TWh à l’horizon 2028. Pour arriver à la cible basse de 14 TWh, il faudrait doubler la production annuelle de 2022, qui était de l’ordre de 7 TWh.
Au niveau européen, le plan RePowerEU ambitionne de porter à 380 TWh la production européenne de biogaz d'ici à 2030, alors que la production actuelle n’est que de 40 TWh.
Tendances actuelles du biométhane en France
L’environnement politico-économique international a restructuré les approvisionnements énergétiques de la France, contraint à trouver des alternatives au gaz naturel russe. Avant le lancement de la guerre en Ukraine, le gaz russe représentait 20% du gaz importé par la France. Dans ce contexte, la demande en biométhane est structurellement orientée à la hausse et permet de combler en partie la fin des importations russes, en plus du développement de nouvelles filières d’importation.
Dans ce cadre, les énergéticiens augmentent leurs capacités de production avec le déploiement de nombreux projets de biométhane en France. Total Energies multiplie les projets d’usine de méthanisation, avec par exemple l’inauguration en 2022 d’une nouvelle usine à Noyal-Pontivy, qui produit du biogaz à partir des déchets d’exploitations agricoles et d’usines agroalimentaires du département. En outre, l’énergéticien français a lancé le plus important méthaniseur de France dans les Pyrénées-Atlantiques, qui couvrira les besoins énergétiques de 32 000 foyers français par an. En outre, pour accélérer le développement de sa filière de biogaz, Total Énergies a racheté Polska Grupa Biogazowa, leader polonais du biogaz, et est devenu à cette occasion le second acteur européen du secteur. Ce rachat rentre dans le droit-fil de la stratégie du groupe hexagonal de produire 2 TWh de capacité en 2025 puis 20 TWh à l’horizon 2030.
De son côté, Engie vient d’acquérir Ixora Energy, l’un des leaders britanniques de la production de biométhane. Ce rachat n’est que la première étape de sa stratégie visant à renforcer sa présence sur le sol européen. Leader en France avec une capacité de 670 GWh par an au 30 juin 2023, le groupe prévoit d’investir 3 Md€ d’ici à 2030 pour porter à 10 TWh ses capacités de production.
Le potentiel de croissance du marché du biogaz français attire de nouveaux acteurs étrangers sur le marché hexagonal. La compagnie pétrolière Shell, qui a fait son entrée sur le marché français à la suite de l’acquisition du producteur de biométhane Nature Energy, souhaitait lancer un projet de méthaniseur géant en Loire-Atlantique pour un investissement estimé à 88 M€. Toutefois l’opposition politique locale a fait échouer ce projet, sans pour autant juguler les ambitions de Shell, toujours à la recherche d’opportunités d’investissement en France dans le secteur du biométhane.
Biométhane et économie circulaire
Le biométhane est une solution durable pour les stratégies environnementales locales. Il s’agit d’un gaz vert ayant la capacité de valoriser les déchets produits dans les territoires. Selon GRDF, à l’échelle d’un projet d’aménagement local, la valorisation en biométhane des déchets organiques des habitants, des entreprises et bâtiments publics représente environ 10% à 15% des consommations énergétiques du territoire. En outre, la production de cette énergie est également porteuse d’emplois. En effet, la filière biométhane permet de créer en moyenne 3 à 4 emplois locaux non délocalisables par installation d’unité de méthanisation.
Soutenabilité de cette énergie verte
La filière du biogaz peine depuis 2022. Les producteurs de biométhane ont subi une hausse des coûts de production et la flambée du prix de l'énergie. La filière a en effet été touchée par l'augmentation du coût de l'électricité utilisée pour épurer le biométhane et l'injecter dans les réseaux en substitution du gaz naturel fossile. Malgré les aides gouvernementales, la filière a subi une multiplication par cinq de sa facture énergétique, parallèlement à une hausse des attentes salariales et des coûts de transport.
De ce fait, initialement revalorisé une fois par an, le tarif du biométhane a été revalorisé d’environ 12% par le Ministère de la Transition énergétique en juin 2023, qui a annoncé à la même occasion que le tarif sera désormais indexé deux fois par an.
À la suite de cette revalorisation, le prix d'achat du biométhane par les fournisseurs de gaz se situe dans une fourchette entre 90 et 100 € selon la taille des sites, en vertu du tarif réglementé par un contrat cadre fixé par l'Etat. Le prix est pour le moment largement au-dessus du prix de marché du gaz naturel. Cet écart est compensé par l'Etat français auprès des acheteurs. Toutefois, lorsque le prix du biométhane est inférieur, comme cela a pu être le cas après le début de la guerre en Ukraine, c'est l'Etat qui perçoit l'écart de prix.
Du côté des producteurs, cette revalorisation constitue un levier majeur pour investir durablement dans la filière, alors que les volumes de biogaz sont appelés à augmenter fortement. En effet, le 1er janvier 2024, avec l'entrée en vigueur de l'obligation pour les particuliers de trier leurs biodéchets suite à une disposition de la loi anti-gaspillage, les usines de méthanisation devraient connaître une hausse sans précédent de leur taux d’utilisation.
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